Daniele Simioni

« Je suis de nationalité italienne. Mon histoire commence un mardi d’avril, il y a 40 ans, à Cittadella, un village situé dans la région de Padoue, et qui conserve toujours sa structure et son allure médiévale.

J’y ai vécu toute ma scolarité jusqu’à l’obtention de mon baccalauréat scientifique.

Par la suite, je suis allé à Venise pour mes études universitaires. Après un an d’économie j’ai entrepris des études de langues et cultures étrangères, en me spécialisant en japonais et en anglais.

J’ai obtenu le « Laurea », l’équivalent de la licence en France et puis je me suis mis à la recherche d’un travail. J’avais 23 ans.

Je voulais intégrer une entreprise qui commercialisait avec le Japon. Comme cela était compliqué, j’ai décidé de partir au pays du soleil levant afin de me perfectionner et trouver un emploi sur place.

Alors que je préparais mes papiers et mon dossier, une amie qui partait pour Londres, et qui n’avait pas trop envie de partir seule, m’a proposé de l’accompagner !

Finalement, c’était une opportunité pour moi et me voilà 10 jours plus tard à bord d’un avion !

Nous avons atterri à Colchester, dans le nord de l’Angleterre. Quelques jours après notre arrivée, je suis reparti pour Londres, seul. Mon amie avait changé d’avis et avait décidé de rentrer en Italie.

J’ai d’abord trouvé du boulot dans un café pendant quelques mois puis j’ai travaillé dans une service clients en ligne. Entretemps j’ai fait un master en marketing.

Je n’ai pas trop aimé vivre et travailler à Londres : c’est une métropole beaucoup trop grande et violente. C’était cependant une expérience très marquante dans ma vie !

En 2007, au bout de 2 ans de séjour à Londres, j’ai eu l’opportunité de trouver du travail à Dublin où j’y suis resté 8 ans !

A Dublin, j’ai d’abord travaillé 6 ans pour Jean-Claude Decaux, une entreprise française de publicité. J’étais chargé de gérer un portefeuille client. Par la suite, j’ai été embauché par PayPal, le site de paiement en ligne, où j’y ai rencontré ma compagne actuelle lors de la fête de Noël. Elle travaillait pour l’antenne de PayPal au nord du pays, à Dundalk, une ville frontalière avec l’Irlande du Nord et pas tout à fait étrange à la présence de cellules terroristes nord-irlandaises !

J’ai bien aimé Dublin : c’est une capitale à taille humaine, pleine de musique partout. Les Irlandais sont des gens sympas, très bavards et de très grands buveurs !

En 2015, nous sommes partis pour Dhaka, au Bangladesh. Ma compagne avait décroché un poste d’attaché de coopération et d’action culturelle à l’ambassade de France.

Puisqu’elle est diplômée en relations internationales, c’était une belle opportunité ! 2 mois après avoir trouvé sur la carte où était Dhaka, nous étions au Bangladesh !

Quelle expérience ! La capitale la plus peuplée au monde, une richesse extrême, à côté de la pauvreté la plus terrible, une impression d’étouffer en permanence car la chaleur tropicale et la poussière sont omniprésentes, des embouteillages continus, du monde partout…mais des gens très accueillants, malgré leur condition.

J’ai dans un premier temps travaillé pour une agence immobilière. Mon objectif était de trouver des clients étrangers.

Puis, pour une entreprise italienne qui commercialisait des produits photovoltaïques. Je passais plus de temps dans ma voiture bloqué dans la circulation que dehors ! J’avais un chauffeur car c’était impossible de se déplacer seul !

Durant notre séjour qui aura duré 1an et demi, le pays a subi plusieurs attentats djihadistes. D’ailleurs, ma compagne a entendu à plusieurs reprises des coups de feu dirigés contre l’ambassade de France. A l’été 2016, l’attentat le plus meurtrier a eu lieu dans un restaurant de Dhaka, très fréquenté par des étrangers et où nous y allions régulièrement : 12 italiens et 8 japonais avaient perdu la vie, massacrés à coups de machette. J’y ai perdu des connaissances. Par chance, nous étions en France pour un mariage quand cela est arrivé.

Cet évènement a été très traumatisant. Après, nos vies ont changé. Nous vivions reclus, nous passions de notre appartement à nos activités, la peur au ventre.

En septembre 2016, nous avons décidé de rentrer définitivement en France. Nous sommes arrivés à Avranches dans la Manche, où habite la famille de ma compagne. C’est à la mairie de l’Aigle qu’elle a trouvé un travail en tant que chargée du développement culturel.

Pour ma part, j’ai trouvé un travail de courtier en France pour une entreprise italienne, et j’ai commencé à apprendre le français.

Ensuite, j’ai travaillé pour une entreprise normande de protections auditives, qui voulait conquérir le marché italien. Presque un an plus tard, j’ai effectué une reconversion professionnelle en maraîchage. J’ai suivi une formation BPREA au lycée agricole de Sées, tout en travaillant en même temps dans plusieurs exploitations.

Cela ne vient pas de nulle part : mon père était technicien agricole et mon grand-père avait une ferme céréalière avec une exploitation de Kiwis et des vignes aussi. Le désir de vivre plus en lien avec la nature, et plus en cohérence avec mes valeurs m’ont poussé à faire le pas : 4 ans se sont écoulés, 2 enfants sont arrivés à qui je peux dédier du temps. Je n’ai aucun regret.

Depuis septembre 2018, je suis maraîcher salarié à l’AMAP « La Croc’cinelle de la Risle » à St. Sulpice sur Risle, près de L’Aigle Nous faisons du maraîchage en BIO. Nous réalisons entre 50 et 60 paniers par saison. Nous commercialisons aussi des produits locaux, tels que du miel de Moulins La Marche, des tisanes des Planches, des jus de pommes de Fay etc. J’aimerais bien pouvoir mettre en place un point relais à l’Aigle.

A terme, j’aimerais bien m’installer à mon compte, si je trouve une bonne opportunité.

Si j’avais un conseil à prodiguer, ce serait d’essayer le travail sur plusieurs saisons avant de se projeter dans une exploitation pour être sûr de résister physiquement. Je conseillerais aussi de travailler dans plusieurs exploitations pour découvrir les différentes méthodes de fonctionnement ».

 

Pourquoi Mahéru ?
« Nous avons habité 6 mois à l’Aigle, mais nous cherchions davantage une maison au calme, à la campagne avec un jardin. Nous avons 2 chiens, dont un qui vient directement de Dhaka !
Mahéru fût un hasard : j’avais vu notre future maison en location sur le “Bon Coin”, mais nous en avions trouvé une autre à Cisai-Saint-Aubin.
Un jour, en repartant pour la Manche, nous sommes passés par Mahéru, séduits par l’environnement, nous avons recherché la maison que j’avais repéré et en 10 minutes, nous l’avons visitée et louée ».

 

Ce que j’aime à Mahéru :
« Nous habitons un hameau de 3 maisons, calme, vert et après le Bangladesh, nous respirons enfin un air propre et frais. J’adore ce département boisé très vert. En plus le manque de pollution lumineuse me permet de voir les étoiles comme je n’en avais jamais vu dans ma vie ! »

 

Souhaits pour Mahéru :
« J’aimerais des moments de partage, de fêtes, en dehors des vacances d’été ».

 

Portraits Malthusiens : « Si vous étiez. »
Un arbre : « Un sapin, pour son parfum, pour être toujours vert et très élancé vers le haut »
Une saison : « L’automne, pour sa fraîcheur, l’air, la couleur de la végétation, c’est magnifique »
Une couleur : « Le bleu – c’est la mer, le ciel, la liberté »
Un pays : « La France – je suis toujours venu en été en France, je suis toujours étonné par la variété de paysages : sauvages, plats, vallonnés, montagneux…
en Italie, j’ai la sensation d’un pays petit, étroit, urbanisé …
L’Irlande, j’aime la côte ouest avec ses falaises abruptes, ses paysages…Connemara… »

 

Un personnage célèbre marquant :
« Arsène Lupin, pour sa légèreté. De ce temps, c’est une vertu à cultiver. En plus, il est drôle, ne se prend jamais au sérieux. J’ai lu tous les livres en italien et maintenant je les lis en français ».

 

Quel événement historique vous a marqué….
« Les attentats de juillet 2016 à Dhaka. Nous avons perdu des connaissances et depuis nous voyons la vie différemment. Rien n’est pour toujours, tout peut basculer d’un moment à l’autre ».

 

Qu‘est-ce que vous aimez, quelles sont vos passions … :
« La lecture, le contact avec la nature. Je suis très attiré par tout ce qui est artistiques. J’ai fait du théâtre amateur à l’Aigle pour apprendre le français. J’aime bien écrire. J’ai écrit un monologue que j’ai joué à l’Aigle en Scène ».

 

Quels sont vos rêves, qu’auriez-vous aimé faire ou être ?
« Je rêve de pouvoir rêver plus ! J’aimerais être un sorcier comme Merlin et utiliser ma magie pour faire en sorte que l’humanité puisse se rendre compte de sa vraie place au sein de la terre.
“The clock is ticking” Il nous faut une prise de conscience écologique et sociale radicale. Si j’avais une baguette magique, je changerais l’imaginaire des gens afin de changer l’histoire qu’on se raconte à nous-même depuis des milliers d’années, sur notre rôle sur la scène mondiale».